samedi 27 février 2010

Charlie don't surf!


J'ai de nombreux exemples en tête, quant aux personnages sortant de l'ordinaire, mais le premier auquel je vais faire une place dans ces colonnes est le Lieutenant-colonel Bill Kilgore, incarné par Robert Duvall dans Apocalypse Now de Francis Ford Coppola (1979). Pourquoi lui ? Parce que j'ai très récemment acheté une réédition du roman de Joseph Conrad Au cœur des ténèbres dont ce film est inspiré, et que cette réédition contient un DVD version longue du film. Et aussi parce que j'estime beaucoup Robert Duvall comme acteur. Enfin, parce que le personnage de Kilgore est bien emblématique de mon propos sur les personnages sortant de l'ordinaire.


William « Bill » Kilgore commande, dans le film, le 1er escadron du 9ème régiment de cavalerie (1st Squadron, 9th Cavalry Regiment, 1-9 Cav) de l'armée des États-Unis engagé dans le conflit vietnamien. Là où les autres membres de cette unité portent le casque réglementaire sur le champ de bataille, Kilgore, arbore fièrement le chapeau orné des sabres entrecroisés et le foulard jaune, lien d'héritage de la cavalerie du temps des chevaux où le régiment fut créé (1866). Anachronisme et symbolisme, pour ce chef charismatique. Ajoutons à cela une propension à rester debout sous les balles alors que ses hommes ont tendance à se mettre à couvert, une dévorante passion pour le surf qui le fait monter sur sa planche pour affronter des vagues sous les tirs de mortiers ennemis, et des répliques-choc comme « Charlie don't surf! » (« les Viets font pas d'surf ! ») ou « I love the smell of napalm in the morning » (« J'aime l'odeur du napalm au matin ») et vous avez là l'exemple même de ce que j'appelle un PNJ haut en couleurs et inoubliable.

Des personnages pimentés


En plus d'essayer de trouver des idées de scènes ou de scénarios de jeu de rôles dans les livres et les films, je tente aussi d'y trouver des idées pour des personnages sortant de l'ordinaire. À mes yeux, un JdR, qu'il repose sur un univers « terre à terre » (j'évite, à dessein, l'emploi du qualificatif « réaliste », qui fait pousser les marronniers dans les forums rôlistes) ou sur une ambiance « plus grande que nature », gagne souvent en intérêt pour les joueurs lorsque les aventures impliquent des rencontres avec des PNJ bien typés. Le fait qu'ils sortent de l'ordinaire les rend d'autant plus faciles à garder en mémoire. Et j'irais même jusqu'à dire que des PNJ savoureux peuvent aider à camoufler la faiblesse éventuelle d'une intrigue.

Cogiter des PNJ frôlant la caricature, c'est à peu près naturel pour des ambiances « pulp », par exemple, où les savants fous font partie du paysage quotidien. Ça l'est tout autant dans des ambiances de science-fiction, où l'extravagance est quasiment élevée au rang de norme. Mais il n'y a aucune raison de se priver de recourir à des PNJ insolites même dans des univers rôlistes plus « sérieux » ; c'est peut-être même dans ces contextes-là que l'on peut recourir aux contrastes les plus marquants.


La réalité comme la fiction offrent de larges galeries de personnages dans lesquels piocher, de Simon Fraser, 15e Lord Lovat, débarquant sur la plage normande « Sword », le 6 juin 1944, au son de la cornemuse de son piper personnel Bill Millin, au chasseur de primes Gaff amateur d'origami dans Blade Runner, en passant par le chevalier d'Eon vivant une partie de son existence habillé en femme. N'hésitez donc pas à vous inspirer des détails qui font mouche. Par exemple :
- une tenue vestimentaire qui détonne totalement dans l'environnement, tel le costume d'écolier, avec veste, pantalon court et cravate (de son lycée Ashfield Boys High School, de Sydney), porté par le guitariste d'AC/DC, Angus Young ;
- des accessoires, comme l'éventail du créateur de mode Karl Lagerfeld (oui, je sais, rien ne m'arrête) ;
- une marotte en contradiction avec le reste de la personnalité, comme l'ogre amateur de miniatures en cristal, dans la série de BD Garulfo d'Ayroles et Maïorana ;
- des répliques caractéristiques, comme le cinglant « Go ahead, make my day! » de l'inspecteur Harry Callahan dans Sudden Impact de Clint Eastwood (1983), ou le plus léger « Freine, Mimosa, freine... » d'Une époque formidable de Gérard Jugnot (1991).

Alors, forcez le trait ou jouez le contraste, mais évitez la fadeur, si vous voulez que vos PNJ « habitent » vraiment vos scénarios.

lundi 22 février 2010

Une pépite dans la boue ?

L'œuvre dans laquelle je pioche de l'inspiration n'a aucun besoin d'être un sommet de la littérature ou du cinéma. Comme je l'ai écrit dans un précédent billet, c'est même assez pratique de piocher dans quelque chose de troisième série, parce que ça limite le risque que les joueurs connaissent ou reconnaissent la source d'inspiration. C'est comme ça que j'ai pioché des trames de scénarios dans des romans dont on se vante rarement d'en avoir lu un seul de la série, tout en reconnaissant connaître l'existence de ladite série.
Ainsi en est-il d'Embuscade à la Khyber Pass, le n°72 de la série SAS de Gérard de Villiers.

Pas la peine de s'étendre longtemps sur le principe de la série, qui voit un aristocrate autrichien ruiné servir d'agent contractuel à la CIA, dans des aventures mêlant relecture de l'actualité, détails « faisant vrai », tortures pas toujours raffinées, pornographie sexiste pas plus raffinée, et racisme à peine voilé.
Cette Embuscade à la Khyber Pass, publiée au début des années 1980, a pour toile de fond la zone de frontière entre Pakistan et Afghanistan, ce dernier étant, l'époque, occupé par les Soviétiques. Dans ce roman, un agent de la CIA organise une rencontre secrète entre divers chefs rebellés contre la présence soviétique, mais il est grièvement blessé dans une embuscade. SAS est envoyé à la rescousse. L'intrigue tourne ensuite autour de la récupération de photographies qui étaient en possession de l'agent blessé, et qui représentent les divers chefs invités à cette réunion secrète. [Attention, révélation] Si ces photos ont autant d'importance, c'est que l'un des chefs invités a été tué par l'ennemi, et que c'est un imposteur qui compte participer à la réunion et éliminer les autres chefs rebelles. La photographie du « vrai » chef permettrait de démasquer l'imposteur et de faire échouer la machination.

Là encore, il n'est pas très difficile de tirer de ce roman de médiocre qualité une trame satisfaisante pour une aventure de JdR. Il suffit d'en retenir les éléments suivants :
  • une rébellion composée d'une mosaïque de mouvements pas toujours sur la même longueur d'onde ;
  • l'organisation d'une rencontre secrète des chefs ;
  • le remplacement d'un des chefs, morts, par un agent du « camp d'en face » ;
  • l'existence de signes de reconnaissance permettant de s'assurer de l'identité des invités ;
  • une aventure tournant autour de la disparition, de la recherche et de la compréhension de l'importance de ces signes de reconnaissance pour démasquer l'imposteur.

J'avais procédé à une adaptation rôlistique de cette trame à la Révolution mexicaine de 1910-1911. Pour apporter la « chair » mexicaine à ce squelette de trame, j'ai emprunté aussi bien au film Il était une fois la Révolution de Sergio Leone, qu'aux BD de la série Los gringos de Jean-Michel Charlier (sénario) et Victor de la Fuente (dessin), au livre Le Mexique insurgé de John Reed qu'à l'ouvrage Villa, Zapata et le Mexique en feu de Bernard Oudin.

D'autres séries de romans « de gare » peuvent fournir des trames de scénarios de JdR : comme les trames de ces romans sont généralement assez simples, les décortiquer est un bon moyen de se faire la main à cet exercice, avant d'attaquer le décorticage d'intrigues plus complexes.

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samedi 20 février 2010

Un exemple concret (suite) : De Simla, 1922, à Paris, 1567

Comme les pires besogneux exploitant leur filon jusqu'à l'épuisement, j'ai osé mener une adaptation supplémentaire des Énigmes dans l'Himalaya de Barbara Cleverly, en plus de celles dont j'ai parlé dans mon précédent message. Mais, cette fois-là, c'était pour changer complètement de décor et de siècle. J'étais, à cette époque-là, dans une de mes périodes où la plume me démangeait du côté de la rapière et j'avais envie de poursuivre ma collaboration à la gamme « officielle » de Te Deum pour un massacre avec un scénario.
 
Un collaborateur (et talentueux illustrateur) de la gamme avait éveillé ma curiosité sur l'activité des espions espagnols à Paris pendant la période des guerres de religion et m'avait mis sur la voie d’une passionnante bibliographie. Je me suis donc orienté vers l'écriture d'un scénario d'espionnage, mais sans le traiter sur un mode « sérieux » comme les romans  à la Eric Ambler (style que j’apprécie beaucoup, pourtant) ; je me suis plutôt laisser porter par les ambiances que l’on trouve dans les œuvres de Michel Zevaco ou d’Alexandre Dumas, parce que je suis convaincu que les aventures pour Te Deum pour un massacre peuvent pleinement s'inscrire l'héritage de ces feuilletons enlevés de cape et d'épée.
Mais, même si j'apprécie l'univers de Te Deum pour un massacre, je n'en suis pas un connaisseur dans le détail, et j'avais envie de pouvoir ancrer le scénario dans une toile de fond « géopolitique » plausible. C'est l'auteur du jeu qui, à partir de la trame générale que je lui avais soumise avant de me lancer dans l'écriture, m’a apporté ces éléments d'accroche. J'aurais pu faire sans, et le scénario aurait tout de même tenu debout ; mais ces petits détails de contexte donnaient, à mon avis, une petite saveur supplémentaire.

Il m'est alors resté à habiller mon squelette d'intrigue de cette nouvelle chair. Le nouveau décor était celui de Paris en 1567. L'usurpatrice, victime d'un chantage, était devenue un agent au service des Guise. Son mari, un négociant hollandais, agent secret protestant. Le témoin gênant était encore un chanteur lyrique, encore italien (j'y tiens, que voulez-vous...). Pour que Paris soit entraperçu par les PJ comme un nid d'espions et créateurs d'illusions, j'ai ajouté au générique de l'aventure des agents espagnols, des agents anglais, un prétendu mage égyptien. Et, pour faire bonne mesure « feuilletonesque », des seconds couteaux et un barbier détestable.

Ce scénario est paru sous le titre Jeu de dames, dans Le boutefeu imprimé n°2 (éditions Le Matagot, 2008, ISBN 2-916323-11-2).

Un exemple concret : De Simla à Istanbul

Pour illustrer ma méthode de base, je vais prendre un cas concret parmi les diverses adaptations que j'ai faites. Dans ce cas-là, je suis parti d'un « petit » roman policier de Barbara Cleverly, Énigmes dans l'Himalaya (titre original : Ragtime in Simla).

Le décor : Simla, la capitale de l'Himachal Pradesh, au nord de l'Inde. Adossée aux pentes de l'Himalaya, elle offre un climat doux en été et joue quasiment le rôle de capitale estivale du temps où l'Inde était anglaise.
L'époque : les années 1920.
La trame [attention, ce qui suit enlève ne grande partie du suspense pour qui n'aurait pas encore lu le livre et souhaite le découvrir] : alors qu'il se rend à Simla où l'a convié le gouverneur du Bengale, un fin limier de Scotland Yard, assiste au meurtre de son compagnon de voyage, un chanteur d'opéra. Qui pourrait donc en vouloir à un artiste lyrique sur les contreforts de l'Himalaya ? Bien évidemment, le limier mène l'enquête. Recoupant différents indices, il découvre le port aux roses : une jeune femme de la bonne société anglaise des Indes n'est pas du tout ce qu'elle paraît. Elle est, en fait, l'ex-domestique d'un couple d'industriels britanniques morts noyés dans le naufrage d'un paquebot. L'ex-domestique a usurpé l'identité de son défunte maîtresse et mis la main sur la fortune familiale. Malheureusement, le chanteur d'opéra qui, par un extraordinaire concours de circonstances fait le voyage jusqu'en Inde, connaît bien la jeune femme sous son identité réelle puisqu'ils ont été amants. Craignant d'être démasquée, elle tue donc ce témoin potentiel gênant.

Partant de là, il n'était pas très difficile d'obtenir une trame à adapter en un scénario de jeu de rôle :
  • la colonne vertébrale est l'usurpation d'identité d'une défunte personne de haute condition sociale par une personne de condition plus basse (tant qu'à dépouiller la trame, peu importe que ces personnes soient des femmes ou des hommes) ;
  • l'élément déclencheur de l'aventure est l'arrivée inopinée d'une troisième personne connaissant l'identité réelle de la personne usurpatrice, et son élimination avant qu'elle puisse dévoiler la machination ;
  • divers indices dans l'histoire récente et passée de ces diverses personnes, exploités par le(s) personnage(s) menant l'enquête (le ou les PJ de ce futur scénario de JdR), conduiront à faire la lumière sur cette usurpation.
La possibilité de tenter l'expérience d'adapter ce roman en scénario m'a été offerte par le 5ème concours de scénarios organisé dans le forum de la Cour d'Obéron, en septembre-octobre 2004. Le thème du concours était « illusion d’optique » et chaque scénario proposé devait comprendre, même sous une forme anecdotique, l'élément « inversion des rôles ». J'étais alors en pleine lecture de Castle Falkenstein  et du supplément Ottoman Empire  paru dans la gamme d'adaptation de cet univers au système Gurps, et il m'avait semblé que la trame de ces Énigmes dans l'Himalaya pouvait être transposé sans trop de souci de l'Inde des années 1920 à l'Istanbul de cette uchronie XIXe siècle qu'est l'univers de Castle Falkenstein.

Pour bâtir mon intrigue, je suis donc parti de mon usurpatrice, ancienne femme de chambre d'une dame anglaise de bonne famille. J'ai « remarié » cette usurpatrice à un Anglais installé à Istanbul où il fait le commerce d'Orient et Occident et vice-versa, et j'ai fait de cet Anglais un agent secret de la Couronne.
Pour ce qui est du témoin gênant, j'ai gardé l'idée fournie par le roman, mais j'ai transformé le chanteur russe en chanteur italien, en partie par envie totalement subjective, et en partie parce que ça évitait de mettre le chanteur trop en avant dans l'aventure. Aurait-il été russe que les joueurs auraient peut-être démarré sur une fausse piste de rivalité russo-turque ; or j'avais déjà quelques fausses pistes dans la manche, et je ne souhaitais pas en mettre trop.
J'ai fait mener l'attaque destinée à faire taire le chanteur d'opéra par les « Frères du Droit Chemin », des fondamentalistes visant à restaurer la grandeur ottomane. Pour brouiller un peu les pistes, j'ai mis le négociant anglais dans les victimes de l'attentat, pour qu'il soit éventuellement vu comme la cible principale (soit en tant que riche négociant « infidèle », soit en tant qu'agent secret pour ceux qui connaissaient son activité cachée).
Pour donner une teinte d'espionnage à cette aventure, j'ai fait de l'usurpatrice un agent des services secrets prussiens, chargée d'infiltrer le réseau d'agents anglais auquel appartient le négociant, et j'ai fait des Frères du Droit chemin les marionnettes manipulées par les Services prussiens.

Le tour était joué ! Un peu d'habillage complémentaire, un spirite pour donner une touche de charlatanisme, et le scénario « Vous ai-je déjà vue quelque part ? » participait au 5ème concours de scénarios de la Cour d'Obéron.

Peu après cette adaptation pour Castle Falkenstein, j'ai écrit une adaptation pour Arkeos, sous le titre « À qui ai-je l'honneur ? », toujours dans ce décor stambouliote, mais cette fois-ci en 1934, et en remplaçant les agents prussiens par des agents allemands.

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  • Références du roman en VF : Barbara Cleverly, Énigmes dans l'Himalaya, éditions LGF, collection Le Livre de Poche, 2004, ISBN 978-2253099086.

Ma pratique de base : décortiquer puis rhabiller

Ce que j'aurais pu - ou dû – ajouter dans mon préambule, c'est que si j'ouvre ce blog sur les « inspirations pour des scénarios de JdR », c'est surtout parce que je crée très rarement des scénarios de JdR à partir d'idées fortes personnelles. Je le dis sans honte, je suis plutôt un « recycleur » : je m'inspire directement de choses créées par d'autres et qui m'ont séduit (la trame d'un polar, les décors d'un film, un personnage incarné par un acteur, un fait divers etc.). Parfois je recycle une seule œuvre pour un scénario, parfois j'en mêle plusieurs, pour apporter de la variété ou de la surprise, avec plus ou moins de bonheur.

Je ne prétends pas détenir une formule magique pour procéder à un tel recyclage de trame de roman, de BD ou de film. Mais j'ai au moins développé une méthode qui me convient, et pourra intéresser d'autres « recycleurs », actuels ou futurs, dans mon genre. Dans ses grandes lignes, la méthode n'a rien de révolutionnaire (remarquez, elle n'a rien de révolutionnaire dans le détail non plus) :
  1. je pars, par exemple, d’un roman dont je me dis qu'il pourrait servir de base à un scénario de JdR ;
  2. j’en décortique la trame ;
  3. je déshabille cette trame de tout ce qui est particulier à l’univers dans laquelle elle s’inscrit, pour n’en garder que le squelette (quelques personnages, leurs motivations, etc.) ;
  4. puis, partant de ce squelette, je le rhabille avec une autre chair, empruntée à un autre univers.
Pour faire une comparaison simple, je vais prendre un exemple dans le cinéma : le scénario des Sept mercenaires (The Magnificent Seven) de John Sturges (1960), sur un scénario de William Roberts, emprunte sa trame aux Sept samurais (Shichinin no samurai) d'Akira Kurosawa (1954), écrit par Akira Kurosawa, Shinobu Hashimoto et Hideo Oguni : un squelette déshabillé de sa chair japonaise « médiévale », et rhabillé avec une chair western.

L'œuvre qui m'inspire n'a pas besoin d'être d'une grande qualité en elle-même : même dans un polar écrit à la chaîne, même dans un film de deuxième ou troisième zone, je peux trouver une idée intéressante à creuser. J'irais même jusqu'à dire que piocher de l'inspiration dans une œuvre méconnue évite au maître de jeu de se retrouver devant des joueurs tout sourire, voire goguenards, parce qu'ils ont reconnu, dans l'aventure en train de se jouer, l'œuvre dont le scénariste s'est inspiré.
Ce qui ne veut pas dire qu'une œuvre « connue » soit moins intéressante à adapter. En particulier les œuvres dont on connaît surtout le titre et pas vraiment le contenu. Je me souviens avoir lu dans un forum, mais sans pouvoir remettre la main sur la discussion en question, un forumiste indiquer qu'il avait adapté en JdR des trames de pièces de Shakespeare et que les joueurs n'y avaient vu que du feu.




Pour décortiquer la trame d'un roman ou d'un film, j'avance sur deux chemins parallèles :
  • d'une part, j'essaie de bien comprendre les grandes parties du scénario, l’ouverture, puis le corps de l’aventure, et enfin la conclusion, qui peut être, en fait, une ouverture sur des aventures à venir. Je dresse alors un schéma qui me permet voir comment s'enchaînent, s'emboîtent, ou se juxtaposent, les différentes parties de l'aventure, et si certaines parties de l'aventure doivent être jouées dans un ordre précis ou pas ;
  • d'autre part, je dresse un organigramme représentant les différents personnages de l'aventure, de premier ou se second plan, (en m'attachant tout particulièrement à ceux qui deviendront les PNJ du scénario de jeu de rôle) et les relations tissées entre eux telles qu’elles interviennent dans le scénario (subordination, souhait de vengeance, complicité, etc.). Cela me donne une idée synthétique des forces en présence, et des appuis ou écueils pour les PJ.
Je procède un peu à tâtons, en dressant ces schémas à la main, parfois avec des couleurs pour des PNJ majeurs ou des scènes importantes. D'un point de vue très concret, il me faut généralement plusieurs versions successives, pour arriver à rationaliser la position des éléments des diagrammes et éviter les flèches qui se croisent dans tous les sens.

Dans un premier temps, je reste collé à l'œuvre que je décortique, en ce sens que j'établis mon diagramme (ou, disons plutôt ses versions successives) avec les noms des personnages de l'œuvre et les « fonctions » dans l'aventure (« le traître », « la victime », « les complices », etc.). C'est dans une deuxième temps que je passe à une version épurée, sans les noms, en ne conservant que les fonctions.
C'est cette version décharnée que j'appelle « le squelette », et sur laquelle je vais m'atteler, dans les phases de travail suivantes à apporter une nouvelle chair, qui devra être la saveur particulière à l’univers de jeu que j’aurais retenu pour cette adaptation.

vendredi 19 février 2010

Eh oui, encore un !

Encore un blog rôliste, direz-vous peut-être. Eh oui, encore un. Pourquoi lancer encore un blog, alors qu'ils ne manquent déjà pas sur la toile, et alors que je participe déjà à quelques forums rôlistes dans lesquels je peux écrire tout ce qui me passe par la tête, ou presque, en matière de jeu de rôle (JdR) ?

L'envie m'est venue d'ouvrir ce blog pour y partager des trucs et astuces en ce qui concerne la cogitation de scénarios pour des parties de JdR à partir d'inspirations très diverses. Une déclaration d'intention qui mérite quelques explications :
  • tout d'abord, je vois le partage dans les deux sens : je souhaite faire connaître les inspirations que je trouve deci delà, et je suis curieux de découvrir celles que d'autres voudront bien me signaler ;
  • ensuite, je n'ai aucune prétention à expliquer ici comment écrire des scénarios de jeu de rôle. D'une part, je n'ai pas de culture quant à l'art de la conception d'un scénario, et d'autres que moi sauront vous prodiguer leurs conseils en la matière ; d'autre part, organiser un texte, le présenter pour qu'il soit facile à prendre en main par celui qui devra le mettre en scène autour d'une table de JdR relève d'une ambition qui n'est pas du tout la mienne par ici.

Mon ambition est bien plus simple que ça :
  • signaler les livres de non-fiction, les romans, les BD, les films, les séries télévisées ou même des faits divers dans lesquels je trouve que l'on peut piocher des éléments d'inspiration pour une trame – ou un bout de trame – de scénario de JdR, pour un personnage haut en couleurs, pour une situation pouvant être intéressante à traduire en jeu ;
  • indiquer, à partir d'exemples concrets, comment j'ai tiré parti d'inspirations pour des scénarios que j'ai publiés sur le net, et dans des fanzines ou magazines.

De ce postulat découlent quelques considérations complémentaires :
  • mes goûts en matière de livres ou de films sont certes assez larges par rapport au lecteur moyen, mais ils sont assez étroits par rapport au rôliste moyen (pour autant que « lecteur moyen » et « rôliste moyen » veuillent dire quoi que ce soit...). Par exemple, j'ai une culture limitée et une affection tout aussi limitée par la « fantasy » médiévale ou contemporaine, la science-fiction. Quant à mes goûts en matière de jeu de rôles, il n'a échappé à personne qui me côtoie dans les forums de JdR qu'ils sont assez marginaux par rapport à la production dans ce domaine. Les inspirations que je relèverai et les JdR auxquels je ferai référence en me disant qu'ils pourraient servir à utiliser ces inspirations ne soulèveront peut-être pas l'enthousiasme des foules. Mais je prends le risque !
  • puisqu'il s'agira, dans ma démarche, d'indiquer, par exemple, en quoi la trame de tel roman ou de tel film peut être utilisée comme colonne vertébrale d'une trame de scénario de JdR, je n'éviterai pas les révélations (les fameux « spoilers »). C'est un choix délibéré de ma part, et je l'expose sans détour. Ne venez donc pas vous plaindre si je dévoile les dessous d'une enquête...

Ce genre d'initiative a déjà été lancé dans au moins deux forums rôlistes que je fréquente, la Cour d'Obéron (cette discussion-ci) et Casus NO (cette discussion-là). Après une petite activité au moment du lancement des discussions, l'essoufflement est vite apparu. Le passage par un blog maintiendra-t-il plus de dynamique sur cette approche que la formule forum ? Je n'en sais rien. Mais je tente l'aventure, et nous verrons bien.

En route pour l'aventure !